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Biodanza et philosophie par Facundo González et Leandra Bonofiglio

“Je ne croirais qu’en un Dieu qui sache danser ».

Friedrich Nietzsche


La Biodanza nous connecte, nous intègre dans la trame de la vie, nous permet de faire fondre les cuirasses qui nous séparent de l’autre, du monde, de nous-mêmes. Elle nous propose de nous regarder en face sans cacher cette partie qui ne nous plaît pas, de faire pousser tous « les nous » qui nous habitent. Si nous arrivons à nous accepter, nous nous intégrons.

La Biodanza nous invite à rompre avec la logique du principe de non contradiction, elle nous rend multiples, nous sommes un, nous somme multitudes. Comme le disait Walt Whitman, nous sommes, nous sommes en chemin, nous sommes une œuvre en construction.

Rolando Toro récupère des idées de nombreux philosophes et nous propose de les danser. La voix de Zarathoustra résonne comme un écho dans chaque séance de Biodanza :

« Et à moi aussi qui aime ce qui vit, il me semble que les papillons ou les bulles de savon et les êtres humains qui leur ressemblent sont ceux qui en savent le plus du bonheur. Voir voleter ces âmes légères, un peu folles, fragiles et mobiles – voilà qui donne Zarathoustra envie de larmes et de chansons. Je ne croirai qu’en un dieu qui s’entendrait à danser. Et lorsque je vis mon diable, je le trouvai grave, minutieux, profond, solennel ; c’était l’esprit de pesanteur – par lui toute choses tombent. On ne tue pas par la colère, mais on tue par le rire. » (Ainsi parlait Zarathoustra, Friedrich Nietzsche)


La légèreté, non de prendre les choses à la légère, mais de les regarder d’une autre perspective, avec de l’air, de la distance suffisante pour qu’elles ne nous tiennent pas prisonniers; pour que le rire nous permette de voir notre vrai pouvoir. L’esprit de la pesanteur nous amène à nous sentir profonds et victimes de notre destin, au lieu d’être des acteurs responsables du chemin que nous choisissons. Nous perdre est une manière de nous rencontrer, si nous osons sortir du connu pour sortir de l’empreinte marquée d’avance, des aventures nous attendent sûrement. Mais si la peur nous paralyse, la crainte de ne pas être capable… Quoi ? Nous ne ferons alors même pas le premier pas. Quand un unique chemin semble vrai et adéquat, nous n’avons pas de moyens d’être authentiques.

Nietzsche rit au nez de tous ceux qui se considèrent sages, au-delà du bien et du mal, avec une capacité de juger et de diviser ; il nous parle de reconnaître notre volonté de pouvoir, notre capacité d’affirmation, d’accepter les conditions de notre existence pour pouvoir, à partir de là, faire quelque chose avec elles ; cesser d’être des agneaux en suivant un modèle et être des êtres authentiques.


L’authenticité que nous propose Zarathoustra et celle à laquelle Rolando nous incite, n’est pas d’aller à la recherche d’une essence dans les profondeurs de notre être, mais d’être fier de notre intégrité à SENTIR/PENSER/FAIRE, de la cohérence d’être qui nous sommes à chaque pas ou travail vers elle.

Un aspect de ce processus a à voir avec rompre les schémas et, en général, à suivre le cœur, à donner place au sentir et au corps. C’est la première rupture que fait une personne dans son processus d’intégration quand elle commence la Biodanza.

« Le plus profond est la peau » nous dit Paul Valéry.


Le deuxième processus, qui ne se fait pas toujours de manière simultanée, est de trouver une façon de rythmer cette liberté pour sentir avec une éthique de l’action.

Pour cela, Rolando nous invite à lire Spinoza. L’éthique des affections que propose le philosophe nous amène à nous reconnaître dans une trame de multiples affections. Mon action engage les autres, beaucoup d’autres, non seulement ceux qui sont directement impliqués mais aussi tout un réseau qui se tisse avec moi.

Ces affections ne vont pas seulement dans un sens. Quand Baruch Spinoza discute, demande et interroge certains principes de base du dogme juif dans les écrits du Talmud (auxquels par son rôle dans la synagogue il a accès), il affirme que Dieu est une substance infinie qui s’exprime en toutes choses existantes et qu’il n’est par conséquent pas hors de chacun de nous, mais que l’âme humaine est faite de la substance de Dieu, même dans ses errements.

Spinoza est expulsé de manière ignominieuse de la communauté. Non seulement il perd contact avec sa famille et doit quitter son village (puisque personne ne voulait même lui parler), mais il est aussi attaqué par quelqu’un qui le cherche. Il survit par hasard à l’attaque et conserve suspendu dans sa chambre le sac détruit afin de se rappeler comment son action avait affecté de telle manière les autres qu’ils ont dû l’attaquer ainsi.


Cela ne signifie pas cesser de penser, de sentir, de faire ce que nous considérons juste, mais nous amène à tenir en considération les effets et affects que notre action éveille. Être authentique ne nous rend pas moins responsable de notre action.

« Il n’y a dans l’âme aucune volonté absolue ou libre, mais l’âme est déterminée à vouloir ceci ou cela par une cause qui est aussi déterminée par une autre et ceci à l’infini. L’âme est une certaine façon de penser, non une cause libre de ses actions. De sorte que l’entendement et la volonté se lient aux particularités qui nous affectent. » (Spinoza, Éthique).

Ce que Spinoza nomme « affecter » est ce qui a une incidence sur notre mouvement ou notre repos, « de sorte qu’un seul et même corps est mu de différentes manières selon la diversité de la nature des corps qui le meuvent et, au contraire, des corps distincts sont mus de différentes manières par un seul et même corps. »

Mon mouvement, même le plus subtil, affecte beaucoup plus que ce que je peux voir. Nous sommes comme des petits cailloux tirés dans l’étang: nous voyons les premières ondes expansives de ce mouvement-amour que nous sommes, mais il nous est impossible de savoir jusqu’où arrivent les effets de notre acte.

« Si le Corps humain est affecté d’une manière qui enveloppe la nature d’un corps extérieur, l’Esprit humain contemplera ce même corps extérieur comme existant en acte, ou comme étant en sa présence, jusqu’à ce que le Corps soit affecté d’un affect qui exclue l’existence, ou la présence, de ce corps. L’âme pourra considérer ces corps extérieurs par lesquels le corps humain a été affecté une fois comme étant présents, bien qu’ils n’existent pas ou ne soient pas présents. »
Une grande partie de nos vivencias revivent ou convoquent des situations où nous avons été affectés par d’autres corps. Bien que ceux-ci ne soient pas présents, ils sont vivants en nous.
Quand Rolando parle de la possibilité d’une vivencia de reparentalisation, il est en quelque sorte dans cette affirmation. Il donne l’occasion d’amener à la mémoire corporelle l’émotion de ce moment et ses affections et d’offrir une nouvelle vivencia qui donnera une affection positive, structurante, comme le dit Myrthes Gonzalez.

« Il y a plus de raison dans ton corps que dans ta plus profonde sagesse » Friedrich Nietzsche.
Rolando nous invite à nous laisser porter par le pouvoir de la musique et de la danse, de nous autoriser la pulsation de la vie : faire tomber les masques que nous mettons pour nous défendre et nous laisser apparaître. Nous donner la permission d’être tout ce que nous sommes, même le vide, d’où naîtra une nouvelle possibilité d’être avec les autres.
L’autopoïèse n’est pas un jeu de mots, mais notre capacité à nous re-créer nous-mêmes, ce qui nous renvoie à la fragilité de la trame, comme le tissu qui produit des harmonies et des dysharmonies. Activons-nous à être acteurs de nos trames au lieu d’être régis par le mandat de la Mimesis. Sortons du calcul et jouons, un acte qui nous rapproche chaque fois plus de notre propre être.
La Biodanza nous propose de savoir être des dieux et des démons, d’être dans nos contradictions, d’affronter nos peurs, nos ombres pour les intégrer, pour dire avec elles Oui à la vie.

Bibliographie
Massimo Cacciari, Le dieu qui danse
Gilles Deleuze, Claire Parnet, Dialogues
Myrthes Gonzalez, Moments structurants
Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
Baruch Spinoza, Éthique
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