top of page
Rechercher

Danser comme une forme de félicité… pour Nietzsche et Socrate

  • Photo du rédacteur: Biodanza-Paula
    Biodanza-Paula
  • il y a 12 minutes
  • 3 min de lecture

La danse peut révéler tout le mystère que la musique offre, Charles Baudelaire

 

Visualiser Nietzsche ou Socrate danser n’est pas la première image qui arrive à notre esprit en pensant à eux ; le premier est un nihiliste taciturne et le deuxième un maître de la dialectique qui a toujours gardé son sang-froid devant les discussions entre animaux politiques. Pourtant, l’image est en soi une des plus heureuses et est basée sur la réalité. Nietzsche et Socrate dansaient et leurs apologies de la danse sont une irrésistible tentation à le faire.

 

Nous sommes tous familiarisés avec la phrase de Nietzsche sur Dieu et la danse (« Je ne croirais qu’en un dieu qui saurait danser ») et son œuvre regorge d’éloge sur cette pratique (danseuses dionysiaques, satyres dansant, hommes, femmes, enfants qui dansent sans cesse) et il fut lui-même un danseur solitaire. Pour lui, la liberté n’est jamais aussi participative dans le sens où nous pouvons choisir comment fluer avec le flux du monde, comme c’est le cas dans la danse. En dansant, on entre dans le rythme des choses, du vent, du pouls de la vie qui est toujours le même mais à disposition du libre-arbitre du corps. C’est là sa beauté. Le corps peut choisir comment participer au rythme et à la gravité alors que la conscience de l’ego est parfaitement concentrée et relâchée. Le moi conduit à l’ensemble des parties dans un jeu libre de forces.

 

Comme Walt Whitman le déclarait sans fin dans ses poèmes, pour le philosophe c’était une stupidité que de croire que le corps matériel et une chose physique qui existe indépendamment de l’esprit. Même penser était pour lui une activité physique : « penser doit être appris comme doit être appris la danse, comme une espèce de danse… Qui connaît déjà par expérience (…) ce tremblement subtil que les pieds légers dans le spirituel transfèrent dans tous les muscles ! » Il n’est donc pas surprenant que cet amant de l’extase physique privilégiait le lyrique sur le discursif, qu’il voulait que ses mots bougent avec des pieds légers – comme Zarathoustra – transcendent leurs significations conventionnelles. Mais ce sont les mouvements de son grand maître Socrate qui lui ont montré pour la première fois cette grande danse de la raison.

 

Dans le Symposium, Xénophon raconte que, pendant que Socrate observait la performance d’un danseur de Syracuse, il fut ébloui par sa grâce. Dans l’harmonie de ses mouvements se voyait encore plus sa beauté que quand il était immobile. Socrate confessa ensuite que Charmide le trouva dansant seul et pensa qu’il était fou, mais quand il lui dit son intention de trouver de l’harmonie dans ses mouvements, Charmide commença sa propre pratique solitaire de boxe (parce qu’il ne savait pas danser). Cela renvoie bien-sûr à la fameuse phrase de Nietzsche (et je l’imagine peut-être venant de cette anecdote) : « Et ceux que l’on vit danser furent considérés comme fous par ceux qui ne pouvaient entendre la musique ».

 

Pour Socrate, la danse était la meilleure manière de bouger le corps, dans une symétrie simultanée de toutes ses parties, à la différence d’un autre type d’exercice physique comme courir ou lutter. La relation entre le beau (kalos) et le plus beau (kallion) est une relation de mouvement et de proportion. Le philosophe, en se rendant compte qu’un corps était beaucoup plus beau et gracieux totalement en mouvement que seulement au repos, il apprit à danser quand il était déjà vieux, à 70 ans. Rappelons-nous qu’il disait aussi : « La musique et la danse sont deux arts qui se complètent et forment la beauté et la force qui sont la base du bonheur. »

 

Les deux philosophes, plutôt solitaires, trouvèrent le bonheur dans la danse. Un bonheur que pourra comprendre celui qui a dansé seul et qui s’est abandonné aux forces dionysiaques qui surgissent des profondeurs vers la superficie du corps. Il est vrai qu’il n’est pas nécessaire que la danse soit solitaire, mais il est plus probable que, seul, la maladresse rigide de la conscience de soi puisse se dissoudre et que l’ego soit suspendu pour un moment. Moins l'ego conscient est impliqué, plus l'agilité du mouvement et la liberté sont grandes. Nous ne créons pas le flux du monde ni les forces gravitationnelles, ni ne pouvons les abolir, mais nous pouvons danser avec elles. Ceci est une des grandes manifestations du libre-arbitre qui nous a été donnée: il faut ressentir, même de temps en temps, toute la liberté du corps. C’est ce que dit le poète et critique de danse Edwin Benby : « Il y a un peu de folie dans la danse qui fait beaucoup de bien à tous »

 

Dansons.

 
 
 

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page