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La synchronicité, une manifestation de l’ordre cosmique universel

Entretien avec Rolando Toro Araneda, créateur de la Biodanza, recueilli par Nadia Robin, Manuela Pointet et Laurent Montbuleau



Revue Recto-Verseau : Que signifie pour vous le concept de la synchronicité décrite par Jung, qui de nos jours est de plus en plus reconnue par les scientifiques. De nature a-temporelle et a-causale, le phénomène synchronistique semble ouvrir de nouvelles perspectives dans la compréhension du monde qui nous entoure et aussi de la conscience…


Rolando Toro : L’image de l’univers qui se dégage du modèle de Jung sur les composantes fondamentales de la dynamique universelle est une intuition ou, peut-être une hypothèse, d’une grande beauté. Ce modèle précède les propositions actuelles su r le temps et l’espace de la physique classique.

En 1930 Jung a énoncé le concept de la synchronicité comme « la conscience temporelle de deux ou plusieurs événements qui ne sont pas en relation de causalité, entre eux et dont le contenu significatif est identique ou semblable ».

Pour Jung, deux facteurs sont en relation dans les expériences de synchronicité :

1. Une image inconsciente entre dans la conscience directement ou indirectement comme le rêve, l’occurrence ou la prémonition.

2. Une situation objective coïncide avec le contenu ; on parle alors de « coïncidence

significative ».

Il est possible que « les coïncidences significatives » soient générées par le contact de notre mental (esprit) avec la dynamique cosmique. La signification prodigieuse de ces résonances apparaît, selon Jung, par la « synchronicité ».

L’essence de la synchronicité est d’être comme un événement individuel et unique, qui se donne comme une manifestation de l’ordre universel.

Les événements synchroniques doivent être considérés comme des actes créatifs, comme la création continuelle d’un modèle qui existe depuis l’éternité dans un continuum espace-temps, dans lequel l’espace n’est plus l’espace et le temps n’est plus le même temps, comme avait proposé Albert Einstein.

Le modèle proposé par Jung est lié à une ancienne notion d’unité ontocosmologique. L’existence humaine devient imprévisible en raison de cette synchronicité entre l’être humain et l’univers.

David Peat soutient que sous les couches de la conscience il y a un niveau collectif et universel de l’esprit (mental) : « Aussi de la même façon que les particules élémentaires se maintiennent à travers une danse qui transcende le monde de la matière, l’esprit aussi est soutenu par une dynamique qui dépasse l’esprit et la matière ».

Au-delà du mental conscient et de la matière telle que nous la percevons, « il existe des modèles et des symétries qui exercent un effet générateur et animateur ».

Jung propose que les synchronicités aient leurs origines dans es combinaisons d’événements physiques qui produisent, pour celui qui les expérimente, une signification claire et immédiate.

Le concept de synchronicité postulé par Jung dans son œuvre « La synchronicité, un principe de connexions acausales », est défini comme « des coïncidences significatives entre un événement externe et une expérience interne…. La simultanéité d’un état psychique avec un ou plusieurs événements du quotidien ».

La théorie de la synchronicité soutient que, dans l’univers, il se produit des millions de phénomènes de résonance simultanés qui seraient synchronisés par une espèce de « montre cosmique ».

Cette synchronicité révélerait une forme de relation entre les phénomènes, différente de la proposition du déterminisme. Les phénomènes qui paraissent causals, répondent en réalité aux lois de la synchronicité, qui par similitude et cohérence se manifestent dans un autre espace-temps.

Les physiciens traditionnels, qui ont hérité du principe de la Causalité, se questionnent sérieusement à propos de l’existence de phénomènes « acausals ». Selon la théorie de la Causalité, à travers Aristote, Descartes, Newton, la dynamique de l’univers serait un processus ininterrompu de causes et effets qui remonterait à la cause première.

Être et l’être (ser e estar) ensemble dans le même espace-temps, indépendamment de son évolution adaptative, est typique du processus créateur humain.


Recto-Verseau : Pouvez-vous nous indiquer de quelle façon la synchronicité peut permettre des processus évolutifs et donc favoriser changements et transformations ?


Rolando Toro : Le développement de la pensée de Jung sur la synchronicité a influencé certaines théories actuelles sur les processus organiques simultanés qui permettent l’Intégration biologique. Le concept de « montres biologiques » organisatrices des phénomènes naturels, nous laisse penser que la synchronicité serait un facteur essentiel, différent du hasard, qui faciliterait les échanges et les transformations.

Les recherches actuelles de la physique quantique admettent une forte possibilité qu’au sein de la matière soient produits des changements et des transformations imprévisibles, à travers des processus intra-atomiques. Ces possibilités sont prises en considération dans la biologie et les neurosciences.

Évidemment, les changements et transformations psychologiques, les processus évolutifs ainsi que l’expansion de la conscience, doivent être le résultat de la synchronicité entre les matrices cosmiques génératives et le cerveau humain qui en fait partie.

Je pense que les transformations subtiles de l’âme et les processus évolutifs de la conscience se produisent comme des phénomènes de la « création actuelle », dus à la synchronicité de facteurs cosmiques et physiologiques complexes.

La synchronicité est caractéristique du processus créateur humain et de ‘imprévisibilité de plusieurs de ses actes.

Notre existence se génère à chaque jour comme une aventure prodigieuse dans la rencontre par synchronicité, du mental (esprit) et du fond cosmique d’organisation. La vie ne serait pas possible sans cette synchronicité de l’être avec l’univers.

La synchronicité permet les processus de communication et de compréhension entre les hommes et se trouve être la base archétypique pour reconnaître les signes.


Recto-Verseau : Quel serait alors le lien entre les archétypes et la synchronicité ?


Rolando Toro : Si les archétypes sont des images éternelles qui donnent forme aux différentes nuances animiques de l’espèce humaine, nous pouvons supposer une résonance permanente entre la base archétypique et le fond cosmique générateur.

Jung, en collaboration avec le physicien Pauli, a construit un schéma orthogonal des processus universels, où il intègre en son contexte la synchronicité.

Ce schéma satisfait, d’une part, les postulats de la physique moderne et, d’autre part, ceux de la psychologie. Pour comprendre ce schéma dans un contexte universel, dit Jung, « nous avons besoin de considérer les facteurs psychoïdes, que j’appelle les archétypes et qui sont indéfinis », cela veut dire qu’ils peuvent seulement être connus et être déterminés par approximation.

La formation des archétypes va plus loin que la structure causale de référence, infraction que Jung appelle « transgressivité ». Ce fait semble mis en évidence dans la dialectique connue de l’évolution entre le hasard et la nécessité, postulés par Jacques Monod.

Speiser propose de considérer les archétypes ou la synchronisation comme quelque chose de contingent qui a la qualité fonctionnelle d’être un facteur constitutif du monde.


Recto-Verseau : Comment s’intègre le concept de synchronicité dans la théorie du Système Biodanza ?


Rolando Toro : La Biodanza est un processus d’intégration humaine qui stimule l’expression des potentiels génétiques par l’induction de vivencias à travers la musique et le mouvement.

Les potentiels génétiques appartiennent à des matrices universelles qui gravitent dans l’être humain pendant toute son existence. Les danses et les situations de rencontre qui sont proposées en Biodanza sont en connexion avec ce fond générateur universel. Il se produit ainsi une résonance entre les systèmes vivants humains et les processus d’intégration cosmique qui génèrent la vie.

L’existence humaine n’est pas une trajectoire isolée, mais bien un processus d’intégration à l’unité plus grande de l’Univers. L’homme est un être ontocosmologique. La synchronicité et la résonance avec les modèles universels donnent à l’existence humaine sa dimension cosmique, son unité transcendante et sa cohérence avec la vie.

Les processus évolutifs de la conscience se produisent sous la forme de sauts quantiques générateurs dont l’émergence semble être de nature acausal.

La Biodanza, avec toutes ses conséquences organiques et existentielles, a un effet intégrateur dû à ce que la vivencia est le pont entre l’être humain et la vie universelle.

La Biodanza stimule la genèse de nouveaux états de conscience à travers l’action synchronisée de la musique, du mouvement corporel et des vivencias évoquées. Cette simultanéité d’actions semble faciliter la résonance avec les modèles universels.

Le Principe biocentrique, qui est le fondement éthique de la Biodanza, oriente toutes les actions humaines autour du phénomène universel de la vie. Nous pouvons dire ainsi que la Biodanza induit des processus naturels de synchronicité.

Les exercices et les cérémonies d’une séance de Biodanza génèrent des relations humaines imprévisibles et créent des formes expressives et esthétiques acausales qui peuvent surgir seulement d’une cohabitation amoureuse avec le monde dans le temps-espace éternel.

Il est possible d’imaginer que depuis l’origine du psychisme humain se répètent avec insistance certains modèles de perception et de conscience, tels que les comportements typiques, antérieurs à la culture, qui possèdent une résonance permanente.

La séance de Biodanza crée un espace optimal qui facilite l’expression de ces potentiels et permet de rentrer en syntonie avec l’univers. Là s’enracine son pouvoir de guérison et de réhabilitation existentielle. Si les maladies sont le résultat d’une perte d’harmonie avec la totalité, la guérison peut être induite par des actes de résonance avec des modèles de vie universelle.


Recto-Verseau : Pourquoi la notion de pulsation est-elle si présente dans la Biodanza ?


Rolando Toro : En Biodanza sont proposés des exercices de pulsation par le contact car la vie et l’univers entier on un caractère pulsant. Depuis la pulsation cardio-vasculaire jusqu’aux pulsars dans l’espace sidéral.

Il n’y a pas de rigidité possible dans la connexion de la vie avec la vie.

A travers ce type de connexion pulsante sont envoyés, dans un même laps de temps-espace, un grand nombre de messages psychobiologiques, qui ne peuvent pas se succéder dans une forme de connexion statique.

Le monde pensé comme un ensemble de processus de synchronicité ouvre de nouvelles perspectives à la psychothérapie, aux arts, à la poésie et à la musique, nous permettant un nouvel accès à l’herméneutique de l’intelligence cosmique.


Bibliographie :

Jung, C.G. : « Synchronicité et Paracelsia » Albin Michel

Jung, C.G. : « Mysterium conjunctionis » Albin Michel

Peat, David : « Synchronicity : The bridge between matter and mind » Bantam Books

Roulin, Paula : « Biodanza, la danse de la vie » Recto-Verseau

Toro, Rolando : « Biodanza » Editions le Vivier

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