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L’éveil d’une spiritualité biocentrique par Andrés Tocalini

La réflexion que nous présentons dans cet article naît, de ces dernières années, comme le fruit d’un processus personnel et d’accompagnement d’autres personnes et de leurs propres processus d’intégration et d’unification personnelle. Le thème que nous traiterons traduit le processus que la Biodanza a suscité dans ma vie et m’amène à constater l’apport de la Biodanza dans l’éveil d’une spiritualité biocentrique.


Pourquoi s’est-elle éveillée en moi, pourquoi suis-je le témoin qu’elle s’éveille chez les autres ; pourquoi dans l’humanité et dans l’univers entier aussi, bien que nous préférerions faire croire que ce n’est pas possible, s’éveille une spiritualité biocentrique, un appel à assumer la force transformatrice de la VIE.


Pouvons-nous parler d’une spiritualité biocentrique ?

Le paradigme biocentrique qui soutient théoriquement le système Biodanza est un signe du processus évolutif de l’humanité et, en ce sens, entre en relation et se complète avec toutes les propositions qui ont surgit ces dernières années de différents regards (sociologique, philosophique, psychologique, éthique, spirituel). C’est un signe de la force immanente de l’humanité qui témoin de la déshumanisation croissante expérimentée au 20ème siècle (nous pensons au mépris de la dignité humaine dans les Holocaustes, les manipulations scientifiques de la « vérité », les corruptions politiques et économiques, la renaissance des fondamentalismes religieux, les totalitarismes et les doctrines de sécurité nationale, la globalisation du capitalisme sauvages et ses lois de marché, etc…) a besoin de faire un saut transcendant. C’est un pas vers la conscience de l’humanité qui se rend compte qu’elle ne peut soutenir la dignité de l’être humain, les luttes pour l’égalité des droits humains et sociaux, la conviction qu’un « autre » monde est possible, sans une conception plus profonde et plus intégrée, non seulement de l’être humain, mais de la VIE dans toutes ses manifestations.


Rolando Toro apporte pour cela, avec la création de la Biodanza, une possibilité de vivre le potentiel de la vie et de collaborer ainsi à la transformation de la réalité personnelle et sociale dans laquelle nous vivons, et souvent seulement survivons.

La vie au centre est le nouveau paradigme. C’est une proposition authentique d’évolution cosmique de notre espèce.


En même temps que ce changement de paradigme « scientifique », s’est répandu ces dernières années le concept de spiritualité au-delà de son identification avec les religions officielles et on a commencé à la concevoir comme le développement et l’approfondissement de la dimension spirituelle de l’être humain, laquelle donne à l’existence humaine un sens pour le futur. Nous pouvons dire que nous marchons vers une nouvelle compréhension de la spiritualité.


Nous nous trouvons aujourd’hui avec une recherche profonde et chaque fois plus fréquente d’expériences de spiritualité. Nous nous trouvons avec la recherche de ceux qui essaye de potentialiser une spiritualité qui reconnaisse l’être humain dans sa totalité, qui ne cherche pas à laisser de côté mais à intégrer les dimensions biologiques et psychologiques, qui éveille cette dimension qui nous définit en tant qu’humains, où les valeurs et le sens de la vie, la rencontre profonde et existentielle avec soi-même et les autres s’entrecroisent ; et pourquoi pas avec un Autre. Une spiritualité qui unifie l’expérience humaine, intégrant les dimensions scindées (corps et âme, matière et esprit, raison et affectivité, pensée et sentiment, etc.).


La spiritualité comme lieu de rencontre du spécifiquement humain et comme expression d’une recherche universelle au-delà des dogmes religieux.


Une spiritualité qui naît de la réalité humaine, du fond intime et personnel de chaque être humain, qui intègre tout son être avec son histoire et sa corporalité, avec ces héritages et ses possibilités, avec sa relation avec lui-même et avec ses relations avec les autres. Une spiritualité qui peut reconnaître que le divin et le sacré n’est pas « en haut », mais dans l’expérience humaine.


Le développement du paradigme biocentrique et la recherche d’une nouvelle spiritualité qui récupère le sens de la vie vont être trouvé au fur et à mesure que l’on trouve ses fondements et son identité essentielle. C’est pour cela que nous trouvons qu’il est possible de parler d’une spiritualité biocentrique. Une spiritualité qui met la vie au centre. Une spiritualité qui manifeste et promeut la Vie. Une spiritualité qui n’est pas le simple suivi d’un code éthique ou d’une liste de devoirs, mais l’ouverture à la force immanente et transcendante de la VIE.


Cette spiritualité partage aussi sa condition épistémologique avec le principe biocentrique. C’est l’expérience spirituelle qui permet le discours sur elle-même. C’est le processus authentique de recherche de sa logique et de sa méthodologie gnoséologique.


Affectivité et transcendance : la base pour une spiritualité biocentrique

L’affectivité est un état d’affinité profonde envers les autres êtres, capable de créer des sentiments d’amour, d’amitié, d’altruisme, de maternité, de paternité et de camaraderies. Cependant, des sentiments opposés (colère, jalousie, insécurité et envie) peuvent être considérés comme des composantes du phénomène complexe de l’affectivité. Par l’affectivité, nous nous identifions aux autres personnes, nous les aimons et les protégeons ; mais nous pouvons aussi les rejeter et les agresser.


Dans le système Biodanza, on n’occulte pas la dimension négative de l’affectivité mais on ne la traite pas d’une façon thérapeutique, on promeut le potentiel affectif positif et sain. L’identité s’exprime dans l’affectivité et la ligne d’affectivité en Biodanza a donc son expression privilégiée dans l’amour. Une personne avec une identité faible n’est pas capable d’aimer et crée des liens défensifs à cause de la peur de la diversité.


L’intelligence a sa base structurelle dans l’affectivité, tout le processus d’adaptation intelligente au milieu et la construction du monde s’organisent donc autour des expériences primitives de la relation affective.


En Biodanza, en développant l’affectivité vers la compassion et l’amour, on travaille avec la racine nutritive de la VIE, l’objectif biocentrique du système ; d’où l’importance des rencontres et des abrazos en Biodanza. L’autre, dans le système Biodanza, est la source de la rencontre avec notre identité. Ainsi, pour Rolando Toro, la Biodanza est « une poétique de la rencontre humaine » qui nous connecte à notre propre humanité. « L’humanité est une condition qui se reçoit et est accordée, ou mieux, qui se reçoit quand elle est accordée. Nous sommes humains quand nous traitons les autres comme humains. L’humanité est un processus réciproque. On est humain dans la réciprocité de la reconnaissance en tant que telle » 1.


En Biodanza, le concept de transcendance se réfère chez l’être humain à la fonction naturelle de lien essentiel avec tout ce qui existe : êtres humains, animaux, végétaux, minéraux ; en résumé, avec la totalité cosmique. « La transcendance, affirme Rolando, est l’instinct de fusion avec la totalité, c’est s’abandonner dans l’utérus cosmique. Nous ne nous référons pas à ’l’au-delà’, mais à la sensation d’harmonie existentielle intense et à la participation écologique entière qu’on peut expérimenter dans des moments subtils de la vie quotidienne ». 2.


Les effets de la Biodanza sur la ligne de la transcendance jettent la lumière sur l’expérience de totalité. Le sentiment de lien intime avec la nature et avec le prochain est une expérience maximale ou « suprême ». C’est une vivencia de plénitude et de beauté, d’expansion de la conscience et d’illumination profonde, d’accès au merveilleux et qui éveille la bonté naturelle de l’être.


La transformation la plus importante que la Biodanza promeut par la vivencia de transcendance est la récupération de la sacralité de la vie et l’abandon du dualisme sacré – profane. C’est la VIE, selon le principe biocentrique, la hiérophanie la plus importante, la manifestation authentique du sacré.


En comprenant les vivencias d’affectivité et de transcendance, nous arrivons avec notre réflexion à reconnaître la dimension transcendante de l’affectivité et la qualité affective de la transcendance. Cette affirmation n’est pas seulement un jeu de mots, mais nous montre la relation intime entre l’affectivité et la transcendance. L’affectivité qui cherche à éveiller la capacité de donner et recevoir de l’amour s’épanouit quand elle transcende et arrive à la vivencia de la totalité. La transcendance, pour être une vivencia authentique de cette totalité cosmique, éveille l’amour universel qui soutient la VIE.


Les deux lignes de vivencia en Biodanza influent sur la capacité perceptive de la personne. Le blocage affectif et la centration sur son propre égo, réduisent et obscurcissent la perception de l’autre et du cosmos en accentuant une séparation qui va à l’encontre de la nature même de la vie. Les vivencias d’affectivité et de transcendance, stimulées pendant les sessions de Biodanza, modifient la perception en l’amplifiant et en lui permettant d’accéder au merveilleux.


Cette expérience mystique n’est pas un abandon de la réalité et de l’engagement avec les autres. Le système Biodanza, en permettant l’accès à la perception du merveilleux, crée des sentiments nouveaux face au monde, éveillant une action effective de défense écologique et de justice sociale. L’amour se transforme en action et transforme la réalité.


De ce point de vue complémentaire auquel nous arrivons dans cette réflexion en essayant de mettre un nom à une expérience personnelle vécue pendant ces années d’intégration personnelle par la Biodanza, et spécialement par les vivencias que nous proposons dans des ateliers ou journée que nous appelons génériquement « psycho-spirituelles », il me semble important de postuler que l’Affectivité et la Transcendance sont la base pour une spiritualité biocentrique.


Biodanza et l’éveil de la dimension spirituelle de l’humanité

La vivencia est conceptualisée en Biodanza comme une expérience vécue avec une grande intensité par un individu dans le moment présent, englobant les fonctions émotionnelles, cénesthésiques et organiques. La vivencia donne à l’expérience subjective de l’individu la qualité existentielle palpitante du vécu « ici et maintenant ». La méthodologie de la Biodanza prévoit l’induction de vivencias d’intégration parce qu’elles impliquent une connexion immédiate et profonde avec soi-même. La vivencia en Biodanza n’est pas seulement un outil méthodologique mais peut être considérée comme une forme directe de connaissance. Ainsi, une épistémologie basée sur la vivencia peut conduire non seulement à une connaissance essentielle de la réalité mais aussi à la sagesse qui consiste en la relation avec le monde, en l’intégration de l’être avec le cosmos.


Cette compréhension de la vivencia nous révèle aussi son pouvoir évocateur du spirituel chez l’être humain. La vivencia évoque, appelle éveille… ce qui est intimement propre à l’être humain, son identité la plus profonde, ce qui manifeste le sens de la VIE.


A partir de mon propre processus personnel en Biodanza et de mon rôle de facilitateur, je suis témoin de ce pouvoir évocateur des vivencias intégrantes ; et pas seulement des vivencias affectives et transcendantes. Les vivencias en Biodanza qui ont le pouvoir d’évoquer le spirituel chez l’être humain sont aussi : les lignes de vitalité, sexualité et créativité, les positions génératrices, les danses archétypales, la transe et la régression et toutes ces vivencias qui agissent sur l’organisme comme totalité et facilitent la réhabilitation existentielle.


Ce pouvoir évocateur du spirituel que possède la vivencia en Biodanza a une profonde connexion avec les origines de l’être humain et la fonction anthropologique de la danse.


De la facilitation de certains ateliers psycho-spirituels dans lesquels, à partir des sessions de Biodanza, nous travaillons avec cette perspective, il me semble intéressant de partager ces « témoignages vivenciels » des participants :

« Je sens que tout ce qui développe mes potentiels et me rend plus complet et libre est étroitement lié à ma spiritualité. La Biodanza a sans doute été un outil indiscutable sur mon chemin de croissance, elle a éveillé des endroits en moi qui étaient anesthésiés. Ce fut une expérience que de récupérer les pièces perdues.

« La Biodanza te fait sentir la transcendance, le spirituel, ton ETRE par le corporel, elle t’ouvre, te fait laisser le mental de côté, elle met ton égo de côté pour te sortir toi-même, ton être vrai, sans rigidités ni masques. Elle t’aide à laisser le personnage pour être toi. »

« C’est une connexion mystérieuse et harmonieuse où la spiritualité flue. Je vis, je sens et m’exprime d’une façon nouvelle, différente, avec plus de profondeur, avec plus d’intégrité et d’harmonie. »

« Je me rends compte que la Biodanza m’aide à récupérer et réaffirmer une spiritualité génuine, à voir le sacré de la vie en moi, dans chaque détail, dans chaque situation, en chacun, dans les rythmes de la nature, dans l’avancée de l’humanité… etc. »


Paroles finales

A partir de la réflexion sur mon propre processus en Biodanza et l’expérience de mon accompagnement de personnes et de groupes ces dernières années, et d’un point de vue et d’une méthodologie biocentrique, je peux conclure en affirmant que « l’apport de la Biodanza dans l’éveil d’une spiritualité biocentrique » est une réalité vécue et une tâche possible.

Si, à la fin de cette réflexion, il faudrait choisir un symbole pour ces conclusions, je n’hésiterais pas à choisir l’ETREINTE. Rolando Toro affirmait que « l’étreinte a une nuance religieuse plus que sexuelle, elle fait allusion à la fraternité, à la communion généreuse ; elle a sa source dans la conscience d’appartenir à une fraternité universelle. L’étreinte est un moyen suprême de percevoir l’autre, non seulement comme un prochain mais aussi comme un semblable. Par l’étreinte, il est possible d’atteindre la transe de fusion de deux identités en une identité plus grande. C’est, en Biodanza, un acte de rencontre avec soi-même et les autres » 2.


Quand pouvons-nous dire que nous sommes en présence d’une spiritualité biocentrique ? Quand notre conscience peut percevoir profondément et s’abandonner dans l’ETREINTE de la VIE qui nous soutien et nous donne l’impulsion à aller à la rencontre des autres dans l’ETREINTE. Aller à la rencontre, non seulement dans la session ou l’atelier de Biodanza, mais dans le monde dans lequel nous vivons, créant une culture biocentrique où tous, aussi les exclus de ce monde, peuvent vivre l’ETREINTE DE LA VIE. C’est seulement ainsi que nous pourrons récupérer la sacralité de la vie.

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Notes

1. GARCÍA C., Biodanza: el arte de danzar la vida, Ediciones Pausa, 2008

2. TORO V. – TERRÉN R., Biodanza, sentir la vie dans toutes ses dimensions. Le Souffle d’Or, 2013

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