Dans le langage commun et courant, les termes Expérience et Vivencia se fondent dans une même signification et désignent le même phénomène. Ainsi, la proposition de cet article est d’établir une différence que je trouve fondamentale à réaliser.
Avant tout, pour contribuer à la clarté de ce propos, quand je fais référence à la notion de vivencia, je le fais dans le contexte de la Biodanza, la vivencia en tant que phénomène cognitif qui se passe pendant les sessions de Biodanza.
Dans la vie quotidienne, la pensée a un rôle central dans le traitement permanent de l’expérience. Son rôle est de catégoriser, classifier et conceptualiser l’information reçue. C’est un système extraordinairement actif qui interfère significativement sur la relation entre l’organisme et le milieu. Notre pensée est continuellement active pour traiter et comprendre la réalité.
Dans la vivencia, par contre, la pensée n’a pas un rôle central dans le traitement de son information. Dans la Vivencia, la pensée remplit un rôle collaboratif et non hégémonique. La Vivencia est une instance de connaissance dans laquelle participent toutes les sources d’information dont l’organisme peut se servir. Sources d’information biologique, instinctive, émotionnelle, intellectuelle, spirituelle et cosmique. Je pense que, dans la vivencia, toutes ces sources se combinent pour déboucher sur l’Insight, sur la révélation de quelque chose d’authentique pour générer une vraie cognition.
Ceci veut dire que l’acte cognitif, l’acte de connaître et de se connaître est à la base un traitement d’information inconscient. Traitement qui est le résultat de l’interaction de toutes les sources de connaissance mentionnées précédemment.
Ceci équivaut à dire que la méthode rationnelle et consciente de se connaître, que ce soit par une psychothérapie ou tout autre technique qui n’implique pas le corps et l’autre, n’est pas suffisante.
La pensée n’a pas l’information fondamentale pour orienter le corps humain vers sa plénitude maximale. Nous sommes cependant attachés à elle parce que c’est la manière la plus facilite de se distancier et de ne pas nous impliquer complètement, c’est une manière de prendre de la distance.
Il est donc clair pour moi que la vivencia est une intuition viscérale qui a des propriétés auto-organisatrices pour l’être, elle est une compréhension authentique d’une peur, d’une beauté occulte ou d’une vérité universelle qui débouche sur la conscience et la pensée presque sans faire un effort intellectuel conscient.
Si quelqu’un souhaite se connaître soi-même, il ne peut le faire uniquement à partir de la méthode rationnelle – verbale parce que cela implique, par définition, une division entre le sujet et l’objet, moi que je veux découvrir, moi que je prends comme objet d’étude. La difficulté qui se présente à nous cependant est que cette entité nôtre qui s’examine elle-même, fait partie de son propre conditionnement interne et, en ce sens, l’inconscient sait que nous allons à sa recherche et planifie au même moment son échappatoire.
Dans la vivencia, il n’y a pas de dissociation entre le corps et l’esprit pour se connaître soi-même. C’est une instance intégrale et totale de l’être, où il n’y a aucune scission, il n’y a qu’un corps – esprit entier qui traite une connaissance pour soi.
Notre mémoire, mémoire personnelle, instinctive, intellectuelle, cosmique, spirituelle, ancestrale, peuvent être éduquées et organisées avec la vivencia. Dans cette ligne, la vivencia s’affiche comme la forme la plus appropriée et la plus éloquente pour connaître l’âme humaine. Quand je dis vivencia, je dis regarder dans les yeux de l’autre, je dis se caresser mutuellement, je dis s’étreindre avec intensité et danser notre existence.
Je pense que nous ne sommes pas des êtres de lien mais quelque chose de plus radical, que nous sommes structurellement constitués pour le lie ; que la biologie du corps ne termine pas dans la peau mais s’étend vers les réseaux affectifs que nous établissons avec les autres êtres vivants. Ceci signifie que je ne suis pas je mais que je suis je et les autres, et la biologie est la structure du nous.
Pour terminer, je vous soumets une phrase poétique de ma récolte intérieure qui se relie secrètement à tout ce qui a été dit : « Je considère la possibilité d’engager un détective pour m’auto-surveiller, pour que, chaque fois que j’essaye secrètement de m’espionner pour une raison étrange, le suspect le devine et échappe ».
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