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Contact humain tant désiré et tant craint par Angeles Gonzalez

J’aimerais contacter…, j’ai mes contacts…, j’ai pris contact avec…, entre nous il n’y a pas de contact…, c’est quelqu’un avec beaucoup de contacts…

Nous entendons tellement de fois le mot « contact » qui fait référence à différentes affections, qui parle de personnes connues dans le milieu familial, social, du travail ou de personnes inconnues (dans le domaine virtuel) ; on parle cependant très peu de l’immense besoin de contacts des corps, du désir d’être touché, étreint, caressé, blotti, contenu, de faim (parce qu’il s’agit de cela), d’explication affective, de tendresse, de qualification (ou valorisation) que nous attendons chaque jour, minute par minute, sans le savoir, sans en avoir conscience.

Il est culturellement accepté que les bébés, les enfants (jusqu’à 5 ou 6 ans), les malades en phase terminale et les animaux de compagnie ont besoin de contact ; cependant, chez les enfants plus âgés, pendant la puberté, la jeunesse, le troisième âge et le quatrième âge il semblerait que non.

Plusieurs fois je me suis demandée quand, où, pourquoi cette dissociation s’est-elle installée. Il existe des antécédents dans les traumas familiaux, la répression promue par les religions, la priorité dans l’éducation des sens de la vue et de l’ouïe sur le toucher, le goût et l’odorat, de même que les contenus intellectuels (cognition) sur les sensations, les émotions et les sentiments.

J’observe l’opposition besoin-empêchement (dans les séances d’Intégration Humaine à partir du mouvement que je facilite). Au moment de s’approcher, de se saluer ou de commencer à danser, ces mouvements sont parfois ceux que nous exprimions quand nous étions enfants face à différentes stimulations ou situations. Nous savons qu’au moment de la socialisation et de la parole organisée (de 4 à 6 ans), nous commençons avec ce mécanisme. Cela parle aussi du monde auquel nous devons nous conformer qui souvent, au lieu de nous expanser, nous met en retrait (avec bien-sûr d’honorables exceptions).

On écrit beaucoup sur le succès, l’abondance, l’appartenance, comme quelque chose à obtenir, les efforts, les courses effrénées, construites sur la peur de nous arrêter, d’être présents, à recenser « ce qu’il y a » (qui est de la puissance et non du manque), à nous connecter, à entrer en résonance, à nous sentir séparé de rien. Ceci est le « contact ».

Une amie il y a quelques jours m’a dit : je ne suis pas pour qu’on me touche, je l’ai écoutée et lui ai répondu : peut-être que tu es là pour regarder et qu’on te regarde, mais quand quelque chose nous angoisse, il y a besoin d’un mot qui nous « touche », d’une étreinte de personnes chères, il y a besoin de contention. Le problème survient avec les « Étrangers » et c’est sur quoi j’aimerais m’arrêter.

Le concept d’ « étrangers » selon le dictionnaire est : se dit de quelque chose qui est éloigné de la nature ou de la condition dont il fait partie, qui existe hors de l’organisme, qui est d’origine extra organique, (ex : apparition d’un corps étranger). Rien dans cette définition ne décrit le pourquoi un autre être humain qui peut être différent nous devient « Étranger ».

Je cite Edgar Morin qui dit :

L’autre est à la fois semblable et dissemblable, semblable par les caractéristiques humaines et culturelles communes, dissemblable par les singularités individuelles ou différences ethniques. L’autre porte effectivement en lui l’étranger et la similitude. Devant un inconnu, nous nous trouvons dans une relation ambivalente, doutant entre sympathie et peur. L’autre est déjà dans le vif du sujet. Le principe d’inclusion est originel, comme le poussin qui sort de l’œuf et suit sa mère. L’autre est une nécessité interne. La relation avec l’autre est inscrite virtuellement dans la relation avec soi-même. Prenons les bactéries, nos ancêtres, aussi diverses et variées qu’elles soient, elles communiquent entre elles en s’offrant « ce qu’il y a de plus précieux », des brins d’ADN dans le sein de l’immense NOUS » (E. Morin, L’humanité de l’humanité, partie 2 : La relation avec l’autre).

Ainsi, le semblable et le dissemblable (une ambivalence qui nous constitue), pourrait remplacer cette étrangeté qui empêche le désir naturel de connaître, cette curiosité qui, dès notre enfance, nous fait utiliser tous les sens, toucher, sentir, sucer, manger, regarder, écouter.

Considérons maintenant la rencontre. Ainsi, que se passe-t-il quand le contact inclut la proximité des corps ? Dans le jeu de séduction où la sensualité, la sexualité et la génitalité agissent, avec plus ou moins de difficulté, la friction des corps le résout. Souvent, cependant, les rencontres sexuelles sont un besoin désespéré de contact, de tendresse et d’intimité émotionnelle.

La plus grande difficulté se trouve dans l’explicitation affective, dans l’absence de tendresse dans la présence et le soutien affectif. C’est la raison pour laquelle je la considère comme un aliment primaire, égal à l’oxygène, à l’eau, au sommeil et à l’ingestion.


Les empreintes des premiers contacts affectifs dans le liquide amniotique ne sont pas anodines. Non plus celles de nos parents ou des personnes qui nous ont accompagnés lors de notre croissance. Même la censure et la stigmatisation du contact par la culture agissent comme un conditionnement dans cette « domestication » dont nous souffrons.


Face à cela, je propose donc quelques possibilités :

- Cultiver progressivement le contact : auto-contact (parcourir tout le corps avec des massages et des caresses).

- Recevoir des massages de personnes de confiance sur les parties du corps qui nous sont inconfortables

- Faire des séances de mouvement qui incluent des contacts légers et progressifs

- Partager l’appréhension et la peur de la proximité de l’autre

- Communiquer tout inconfort et s’il y a quelque chose d’intrusif, mettre des limites

- Dans un groupe, établir des rencontres eutoniques (tonus juste et harmonieux) pour récupérer la confiance dans les approches.


NOUS GRANDISSONS DANS LA NOSTALGIE DU CONTACT depuis notre sortie du ventre, la peau avec ses millions de pores attend de revenir à cette synesthésie, à ce plaisir.


Il n’y a pas d’âge pour y retourner, avec amour et patience, nous pouvons accompagner notre irrigation et notre innervation, le mouvement de nos hormones et, dans cette magnifique mémoire cellulaire, cultiver la floraison d’un corps qui attend.


Je ne désire pas simplifier les causes complexes qui empêchent parfois le contact, mais, en de nombreuses années de pratique, il me tient à cœur de présenter et partager des expériences de corps joyeux qui profitent et qu’il n’y a pas uniquement besoin des douleurs ou des tensions pour qu’on le ressente.


Je rêve d’un monde (et Rolando Toro Araneda l’a fait avant moi en créant la Biodanza) où nous pourrions nous rencontrer, nous regarder dans les yeux, nous étreindre, offrir notre giron, se reposer avec l’autre, un monde empathique, affectif, solidaire, en contact avec la vie, qui est une énergie amoureuse manifestée. C’est la raison et le sens de ma tâche, parce que :


La peau, de ne pas la frotter

avec la peau

craquèle

Les lèvres de ne pas les toucher

avec les lèvres

se sèchent

Les yeux, de ne pas se croiser

avec les yeux

se ferment

Le corps, de ne pas se sentir

avec le corps

s’oublie

L’âme, de ne pas s’abandonner

avec l’âme

meurt…


Je remercie Bertolt Brecht (dont j’ai ajouté ce poème), parce qu’il nomme comme personne la nécessité dont je parle).


Peut-être si nous rêvons tous de la même chose, cela se produit….

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